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  • Mgr Thomas Habib Halim, eveque copte catholique de Sohag en visite en Suisse. Immage: "Aide à l'Église en Détresse (ACN)"
  • Mgr Thomas Habib Halim, eveque copte catholique de Sohag en visite en Suisse. Immage: "Aide à l'Église en Détresse (ACN)"
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    [Translate to FR:] Junge Gläubige beim Gebet in der Kirche in Ägypten. Bild: «Kirche in Not (ACN)»

Mgr Thomas Habib: en Égypte, les chrétiens sont désormais protégés

Mgr Thomas Habib Halim l’assure: à Sohag, une métropole de 600’000 habitants située à quelque 500 km au sud du Caire, sur la rive gauche du Nil, les chrétiens vivent aujourd’hui en sécurité. L’évêque du diocèse copte catholique de Sohag, l’une des principales régions chrétiennes de Haute-Égypte, témoigne en Suisse romande et au Tessin du 1er au 9 juin. Il promeut des projets en faveur des personnes les plus vulnérables de son diocèse, le plus pauvre d’Egypte.

Jacques Berset, pour ACN

Dans un excellent français, ce polyglotte, qui a vécu 7 ans en Italie et œuvré 23 ans durant au service diplomatique du Saint-Siège dans des nonciatures en Amérique latine, en Afrique, en Europe, au Proche et au Moyen-Orient - notamment en Iran, en Irak, au Liban, en Syrie, en Algérie et en Libye – explique ce qui a changé pour la minorité chrétienne copte ces dernières années. Depuis le renversement en 2013 du président Mohamed Morsi, issu des rangs des Frères musulmans, la situation des chrétiens en Égypte s’est beaucoup améliorée, relève Mgr Thomas Habib Halim, en Suisse à l’invitation «d’Aide à l’Eglise en Détresse (ACN)».

En cas de conflit, la sécurité intervient très rapidement

«Contrairement à ce qu’on laisse toujours entendre en Occident, l’arrivée au pouvoir de Morsi était loin d’être un processus électoral démocratique… Et c’était une période très difficile pour les chrétiens. Aujourd’hui, quand il y a des querelles entre musulmans et chrétiens, la sécurité intervient très rapidement, avant, on laissait faire, et cela dégénérait souvent en violences». 

Depuis l’arrivée au pouvoir d’Abdel Fattah al-Sissi, élu président en mai 2014, les chrétiens jouissent de davantage de liberté: «Le président al-Sissi dit qu’il n’y a pas de chrétiens ou de musulmans, seulement des Égyptiens».

Plus de bombes contre des édifices religieux chrétiens, ni d’assassinats

«Le fanatisme de certains musulmans n’a certes pas disparu, mais il a beaucoup diminué et est ‘sous contrôle’. Il n’y a, depuis un moment, plus de bombes contre des édifices religieux chrétiens, ni d’assassinats, comme avant. Il y a davantage de sérénité !» La situation des chrétiens a en effet beaucoup changé depuis l’époque de Sadate, de Moubarak et de Morsi. Sadate avait, en septembre 1981, assigné à résidence le pape Chénouda III, 117ème patriarche d’Alexandrie de l’Eglise copte-orthodoxe, au monastère d’Anba Bishoï, dans le désert du Wadi Natroun. Chénouda III critiquait le rapprochement de Sadate avec Israël et son ouverture en direction des islamistes. 

On constate un changement dans les mentalités

Le président al-Sissi assiste aux célébrations de Noël, il parle à tous les chrétiens. On constate un changement dans les mentalités. «Beaucoup de musulmans viennent nous saluer et nous féliciter à l’occasion des fêtes de Noël et de Pâques. A Sohag, les autorités placent des affiches de félicitation à ces occasions près de mon évêché, également chez les coptes orthodoxes».

A Pâques, Mgr Thomas Habib Halim a eu comme d’habitude la visite du gouverneur, de responsables politiques, de parlementaires, mais cette année également celle des imams. Ces derniers ne venaient pas à Pâques, car pour eux, si Jésus est un prophète pour l’islam, il n’est aucunement le fils de Dieu mort et ressuscité... Mais, estime l’évêque copte-catholique de Sohag, c’est l’exemple venu d’en haut, du président al-Sissi, qui provoque en grande partie ce changement.

Un langage nouveau pour parler des chrétiens

Il utilise un langage nouveau pour parler des chrétiens, qui n’existait pas avant. Le personnel politique suit le mouvement et cela a une influence sur la population. Dans les villages, il n’y a pas beaucoup de problèmes, parce que la coexistence entre communautés est quasi quotidienne. L’évêque signale aux autorités quand il y a des problèmes, et les autorités, qui ont ordre de ne pas faire de différences entre musulmans et chrétiens, interviennent rapidement pour éviter l’escalade des conflits.

L’éparchie (diocèse) copte catholique de Sohag compte quelque 25’000 fidèles, 27 prêtres, deux missionnaires d’Afrique (Pères Blancs), deux religieux franciscains, ainsi que 35 religieuses, des Filles de la Charité, des franciscaines, des franciscaines de Marie et des Sœurs Élisabéthaines. C’est le seul diocèse copte-catholique en Egypte qui ne compte que des prêtres célibataires, selon le vœu de Mgr Thomas. Les protestants ont deux fois plus de fidèles, les coptes orthodoxes sont les plus importants, avec quelque 150'000 fidèles. Sur les 6 millions d’habitants du gouvernorat de Sohag, les chrétiens sont une petite minorité d’un peu plus de 3%.

Une destination de pèlerinage importante

La région de Sohag est une destination de pèlerinage importante pour les coptes grâce à ses nombreuses églises et monastères. Le plus connu est le Monastère blanc (Deir el Abiad), dont l’église remonte au Ve siècle.

La région compte 62 villages ruraux pauvres et ne bénéficie pas de l’apport de grandes entreprises. Raison pour laquelle Mgr Thomas Habib Halim a lancé divers projets de développement pour que les jeunes chrétiens puissent trouver du travail, avec le soutien financier d’ACN, également de l’Œuvre d’Orient, de la Conférence épiscopale italienne, de Missio Aix-la-Chapelle et de Missio Munich.

Les jeunes n’ont pas de travail

«Il n’y a pas d’industrie dans la ville de Sohag. Près de 40% de la population n’a pas de travail stable…». Le diocèse de Sohag cherche un moyen de donner un travail décent aux plus pauvres, en participant au financement de tricycles motorisés aménagés pour faire office de taxi (des touktouks) pour le transport de personnes ou de marchandises. Cette initiative de Mgr Thomas s’adresse en priorité aux familles les plus vulnérables. Elle leur permet notamment d’acheter le matériel scolaire pour leurs enfants.

Des filles coptes qui ont pu étudier apprennent à lire et à écrire aux enfants qui ne peuvent aller à l’école. L’évêché a aussi mis sur pied un centre informatique, des cours de formation professionnelle pour des métiers manuels, des cours de langue (français, anglais, italien) pour les jeunes qui trouvent du travail dans des stations touristiques comme Hourghada, sur la Mer Rouge.

L’évêché dispose aussi d’un orphelinat qui accueille des filles de 5 à 18 ans. L’Église copte catholique est également très présente dans le domaine scolaire, avec une dizaine d’écoles accueillant une majorité d’élèves musulmans. Elle dispose enfin de neuf dispensaires et d’un hôpital. «Tout le monde veut aller dans les institutions et dans les dispensaires catholiques. La population a une grande confiance envers les religieuses!» Les coptes orthodoxes n’ont qu’une seule école et un seul hôpital.

Bonnes relations avec les coptes-orthodoxes

Dans le diocèse, les relations avec les coptes-orthodoxes sont bonnes, tandis qu’au niveau national, «le pape Tawadros, chef de l’Eglise copte-orthodoxe, qui est très ouvert envers l’Église catholique, doit faire face aux évêques conservateurs opposés à l’œcuménisme».

Il est en effet mis sous forte pression par les évêques conservateurs membres de son Synode qui ont été nommés en nombre à l’époque du pape Chénouda. «Ces évêques ne veulent pas du dialogue avec l’Eglise catholique, ils n’ont pas été formés à l’extérieur, ils sont fermés, ne veulent rien changer. Ils n’ont pas une vue universelle», déplore Mgr Thomas Habib Halim. JB